La reprise tant attendue après la trêve hivernale n’aura été que brève. Seules six cyclosportives ont été organisées en 2020, et la dernière en date remonte au 8 Mars, il s’agit de la Jacques Gouin. Les habituelles épreuves de Mai, Juin et Juillet s’annulent ou sont reportées, l’ensemble du monde cyclosportif tant du côté des participants que des organisateurs, se pose la même question : Quand pourrons-nous accrocher un dossard sur une épreuve ?
En début de semaine, le président de la République a annoncé qu’aucun évènement de masse ne serait autorisé sur le sol français avant mi-juillet, et cela dans le meilleurs des cas. Avant cela, la Fédération Française de Cyclisme avait publié un communiqué début avril précisant qu’aucune compétition cycliste ne serait organisée jusqu’au 1er Juin 2020 inclus. Le mot d’ordre est clair. La situation sanitaire en France est encore loin d’être optimale, les mesures de confinement sont renouvelées jusqu’au 11 Mai.
Le monde du cyclosport repose principalement sur des petites structures, et c’est tout une économie qui risque de se fragiliser avec les nombreux reports et annulations en cours et à venir.
Décider d’une annulation pour un organisateur n’est pas une partie de plaisir, comme nous-le confie Patrice Vidal, le président de l’Ariégeoise, forcé d’annuler l’édition 2020. « Nous avons été très attentifs à l’évolution de la situation liée au Covid-19, nous pensions prendre une décision mi-mai, mais au vu de l’ampleur de la situation nous avons pris la décision d’annuler l’édition 2020 dès fin Mars. Il est de notre responsabilité d’assurer la sécurité de tous les participants, des bénévoles et des partenaires. Nous sommes une épreuve de haute montagne exigeante et difficile qui nécessite un entrainement approprié. Avec les conditions actuelles, la préparation nécessaire à notre épreuve ne pourra être optimale. De plus, il faut également songer à la disponibilité des services de secours et de santé. »
Ludovic Valentin, organisateur du Challenge Cyclo'Tour Rotor a également pris le parti d’annuler ses épreuves de début de saison. « On ne fait pas ce métier pour annuler des épreuves. Dans une période comme celle-là, il faut savoir raisonnablement mettre de côté la passion pour la raison et la santé ».
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GF Santini/Mont-Ventoux.
Si certaines épreuves sont annulées, d’autres épreuves estivales comme la GF Santini Mont Ventoux ont pris l’option de reporter en Septembre prochain comme nous l’indique Nicolas Garcera, organisateur de l’épreuve. « Tout en étant responsables et ne pas rentrer dans le organiser à tout prix, il faut savoir être prêts à organiser. Il ne faut pas oublier que derrière des organisations comme la nôtre, c’est une trentaine de sociétés prestataires du milieu évènementiel qui n’a plus de travail dans le cas d’une annulation : chronométreurs, plaques de cadre et dossards, speakers, sécurité, secouristes et restauration… Derrière le sport, derrière l’évènementiel il y a aussi des salariés et des familles. C’est tout un écosystème qui est impacté avec cette épidémie. Notre évènement génère plus de trois millions d’euros à l’économie locale, reporter l’évènement c’est aussi soutenir l’économie locale. Si les conditions n’évoluent pas, si les rassemblements sont interdits, alors il faudra tout annuler. Mais Septembre-Octobre c’est dans plusieurs mois, alors il ne faut pas tomber dans la panique et mener les différentes possibilités de front. Le maintien en est une, l’annulation en est une autre. »
Du côté de l’Ariégeoise, un report a été envisagé dans les discussions du bureau directeur mais n’aura finalement pas été retenu. « Le seul mois de report était Septembre pour ne pas risquer d’avoir des contions météorologiques défavorables sur notre parcours de haute montagne. Sur le mois de Septembre 2020 nous ne souhaitons pas concurrencer des épreuves inscrites sur le calendrier, notamment en Ariège. Pour nous il est important que les organisations se respectent les unes les autres, d’autant plus dans cette situation de crise. »
Pourquoi annuler ou reporter un évènement plusieurs mois en avance ? Un grand nombre de pratiquants se demandent pourquoi annuler une cyclosportive du mois de Juin ou Juillet dès le mois d’Avril avant même de connaître les dernières directives du gouvernement. Deux facteurs poussent les organisateurs à prendre rapidement les choses en main, les démarches administratives et les conditions liées aux participants.
Organiser un évènement sportif en France n’est pas une mince affaire et demande de nombreuses démarches à préparer plusieurs moins en amont. Trois mois pour être précis concernant le dossier à déposer en préfecture. Une prise de décision tardive aurait pour conséquence d’être refusé en préfecture.
Les organisateurs souhaitent également préserver les participants, ne pas annuler en dernière minute et ainsi éviter d’engager des frais inutiles. « Les frais d’inscription pour un participant représentent une petite partie du budget (déplacement, hébergement, restauration…). Nous avons souhaité prendre une position très rapidement car notre épreuve compte déjà 2800 inscrits venants de 35 pays différents. Tous étaient en attente d’une réponse pour organiser leur séjour » nous explique Nicolas Garcera qui a opté pour un report de la GF Santini Mont Ventoux en Septembre prochain.
L'Ariègeoise
Dans ce contexte délicat, les organisateurs d’épreuves cyclosportives offrent plusieurs possibilités aux inscrits pour ne pas les pénaliser. Du côté de l’Ariégeoise, la décision a été comprise par l’ensemble des participants. «Nous proposons le remboursement intégral des frais d’inscription ou le report pour l’édition 2021. Nous avons reçu énormément de messages de soutien, certains coureurs ont même pris la décision de transformer leurs frais d’inscription en don pour aider à lutter contre le Covid-19. »
« Sur la Lozérienne Cyclo, nous proposons un remboursement intégral ou un report sur l’édition 2021. Le remboursement est possible en raison du soutien du département de la Lozère qui maintient sa subvention malgré l’annulation de l’épreuve. Il est très appréciable en ces temps difficiles d’avoir le soutien de nos élus et partenaires » souligne Ludovic Valentin organisateur du Challenge Cyclo'Tour Rotor.
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Certains envisagent le pire et parlent d’une saison blanche, d’autres se veulent rassurants en espérant une reprise des compétitions avant l’automne. Remettre un dossard en 2020, c’est ce qu’espère Ludovic Valentin. « Je reste assez optimiste même si à ce jour nous n’avons aucune visibilité. Jose espérer que nous pourrons, sous certaines conditions, organiser des évènements dès le mois de Juillet. Bien sûr il va falloir s’organiser et s’adapter mais il me semble important de véhiculer un message d’espoir. N’oublions pas que le sport est un vecteur de bien-être et social important. Ces évènements devront se dérouler en bonne intelligence et dans le respect des règles. Tout sera différent, peut-être le moment de revenir aux sources et valeurs du cyclosport, le plaisir, le partage et la découverte avant tout. La performance deviendra secondaire. »
L'Ariègeoise
Quel que soit leur dimension, chacune des épreuves annulées ou reportées en subira des conséquences. Du côté de la GF Santini Mont Ventoux, si annulation il devait y avoir, les conséquences seraient lourdes. « Nous sommes une association avec des salariés à l’année, des frais de fonctionnement tels qu’un loyer annuel, des charges, des emprunts en cours pour le matériel logistique, des prestations extérieures… Tous ces frais sont amortis avec les recettes constituées des sponsors privés, des inscriptions. Nous ne recevons que 3 à 5% du budget en subventions. Tous ces frais courent depuis mi-juin 2019. Il y a déjà donc dix mois de charges consommés. Une annulation serait lourde de conséquences. Si nous reportons toutes les inscriptions sur 2021, cela veut dire faire porter deux ans de charges sur une seule édition, chose qui n’est pas possible à notre échelle, car nous n’avons pas un an de trésorerie de côté».
Même son de cloche du côté de l’Ariégeoise « Cette annulation a d’importantes conséquences financières. L’Ariégeoise est une association avec des réalités d’entreprise à part entière avec des frais fixes élevés. Masse salariale, assurances, loyer de bureau et d’entrepôt de stockage du matériel, frais de communication. Les frais avancés pour l’édition 2020 vont engendrer un bilan financier négatif pour cette année. Nous allons devoir contracter un prêt bancaire pour absorber ces pertes, pérenniser notre manifestation et repartir pour la 26ème édition qui aura finalement lieu le samedi 26 juin 2021. »
Pour la structure LVO organisatrice du Challenge Cyclo'Tour Rotor, les conséquences se font sentir également. « Notre structure compte aujourd’hui cinq salariés. Nous allons perdre une grande partie de notre chiffre d’affaires, 60% si l’activité reprend en juillet, 80% si elle reprend qu’en Aout. Le maintien de l’emploi et la survie de l’entreprise sont actuellement ma principale préoccupation. Je n’ai aucune idée précise sur les réelles conséquences sur ma structure (fin d’activité, suppression d’emplois…). Mais il nous faut positiver et continuer à y croire. La passion nous fait avancer. »
Comme vous le constatez les répercussions liées au Covid-19 sont nombreuses. Les décisions sont difficiles à prendre, parfois précoces mais finalement logiques. En attendant des jours meilleurs, le calendrier cyclosportif français s’apprête à vivre une saison 2020 particulièrement tourmentée. Chose qui reste malgré tout reléguée au second plan face aux difficultés rencontrées par notre pays.